Alexandrie est un songe, un halo. On croit la connaître, avec sa fondation par Alexandre le Grand qui aurait été inspirée par Homère, avec son phare destiné à déjouer les pièges des iles et considéré comme la Septième Merveille du monde, avec la plus célèbre bibliothèque de l’Antiquité finalement détruite dans des circonstances inconnues, avec les amours de Cléopâtre qui y régna jusqu’à sa mort en 30 avant J.-C… Autant d’images qui se bousculent, font la gloire de la cité égyptienne… et doivent beaucoup aux péplums hollywoodiens et aux bandes dessinées de Jacques Martin.
Présentée à Marseille à partir d’aujourd’hui et jusqu’au 8 mai, l’exposition Alexandrie : futurs antérieurs a donc un double avantage : celui de la familiarité mais aussi, celui de la découverte. “Il était important pour nous de revenir aux fondements archéologiques, loin de toute forme de romantisme, explique Arnaud Quertinmont, l’un des co-commissaires. Avec la difficulté de présenter ce qu’était l’Alexandrie antique, notamment en raison d’un tsunami qui a ravagé les côtes et le centre-ville au IVe siècle de notre ère. Pour tenter de faire ‘revivre’ la cité, nous avons donc recours à des récits d’auteurs anciens mais également à des pièces de monnaie. Ces différentes sources nous offrent l’image d’une ville multiple teintée d’influences égyptienne, grecque ou proche-orientale”
Ainsi, le visiteur du Mucem ne manque pas de s’attarder devant une imposante maquette du phare légendaire, qui s’est effondré au XIVe siècle. Nulle trace n’en subsistant en dehors de blocs immergés, elle a été réalisée en s’inspirant des représentations qui figuraient sur diverses monnaies. Un choix renouvelé au fil des siècles qui montre l’importance des ports d’Alexandrie, que le géographe Strabon surnommait “le comptoir du monde”.
À travers quelque 200 pièces en provenance de collections prestigieuses (notamment une bague en or au nom de l’empereur romain Antonin le Pieux, prêtée par l’Allard Pierson d’Amsterdam), l’exposition souligne le rayonnement qui fut celui d’Alexandrie : durant l’époque hellénistique, elle fut la plus grande ville du monde grec avec plus d’un demi-million d’habitants. La cité ayant été détruite, bien des mystères subsistent toutefois sur la manière dont vivait le peuple, contrairement aux élites qui ont pu être documentées.
Loin de se contenter de ce voyage dans le passé d’Alexandrie, le Mucem s’emploie également à le confronter à une expression vivante. D’où la présence d’oeuvres d’art contemporaines, trois étant réalisées spécialement pour l’exposition : “Nous avons retenu seize artistes, avec des oeuvres produites entre 1987 et 2022, détaille la co-commissaire Sarah Rifky. Elles complètent notre compréhension et dialoguent avec la ville”.